vendredi 25 juillet 2014

Départ pour le camp



Et voilà, le jour J est arrivé. Mon grand garçon part pour la 3ème fois au camp scout. 7 jours...Que c'est long 7 jours!

Des semaines qu'il attend ce moment avec impatience, il est gai comme un pinson...alors pourquoi ça fait si mal dedans?

"Oh, il va bien s'amuser"
"Il va bien profiter"
"Il est heureux avec ses copains"
"Laisse le grandir"

Bien sûr que je le laisse grandir et même si devant vous, je donne l'image d'une mère forte et confiante, le soir, quand les lumières s'éteignent, les larmes coulent toutes seules.

Cette intégration, je l'ai voulue, je l'ai eue et c'est une réussite absolue. Je ne peux dès lors pas me plaindre et prétendre un quelconque réconfort auprès de mes proches.

Arrivé au lieu-dit du camp, il est attendu, ce qui renforce son sentiment d'être au bon endroit. Pas même le temps de l'embrasser, qu'il est déjà parti rejoindre ses amis pour jouer au ballon.

J'aurais tant aimé que l'on puisse lui expliquer l'organisation de son sac, lui rappeler les règles de base, lui dire combien je l'aime..

Sur ses bras et ses mains, j'inscris des messages d'amour. Il les lit et me sourit.

Amuse-toi mon grand, j'ai hâte de te retrouver!!

jeudi 24 juillet 2014

Viva Mexico!

Cet été, direction les plages de sable fin, le soleil de Mexico.

Malgré une grève des controleurs aériens, des vols annulés, d'autres retardés et un bagage perdu à destination, nous avons décidé que rien ne pourrait gâcher nos vacances en famille.

Dans la file d'attente à l'aéroport, j'observe tous ces voyageurs stressés par tous les changements de ces dernières heures, l'attente est longue. Dans cette file, il y a des jeunes couples, d'autres un peu moins jeunes, l'un ou l'autre bébé et puis, il y a nous.

Nous avec trois enfants qui aiment la vie, qui rient, qui chantent. Pas vraiment turbulents mais plutôt heureux d'être là et de se retrouver en famille pour plus de 10 jours. Trois enfants dont un handicapé, leurs regards en disent long. Ces regards qui vous disent "12 heures de vol à partager avec eux, quel enfer!"

Nous traversons l'allée centrale pour rejoindre nos sièges, on nous déshabille du regard. Je n'ai pas envie d'y prêter attention. Nous nous installons, faisant comme si nous étions seuls à bord.

Soudainement, j'ai peur. Je repense à ces quelques témoignages lus dans la presse quelques mois plus tôt, relatant le fait qu'un pilote n'avait pas accepté de prendre à bord un jeune trisomique, le forçant à descendre de son appareil. Les parents, choqués, avaient dû subir cette humiliation en public, trouver une solution et surtout, puiser dans leur réserve de courage pour porter plainte.

Et si ces regards posés sur moi voulaient m'avertir que je subirais le même sort que cette famille. J'ai chaud, j'ai froid, je suis mal assise, je ne sais plus comment me mettre...pourvu que ce fichu appareil décolle!

L'hotesse se dirige vers nous, elle semble sereine et s'adresse à moi avec son plus beau sourire. En une fraction de seconde, je me suis littéralement liquéfiée. Impossible de comprendre le moindre mot d'anglais, je ne suis plus que l'ombre de moi-même, je suis déjà ailleurs.

Mon mari me regarde d'un air étonné et me rassure : "Ne t'inquiète pas, elle voulait juste vérifier que les enfants avaient bien bouclé leurs ceintures de sécurité".

Zen, restons zen, je vais finir au prozac!

Le vol se déroule à merveille, comme à chaque fois. Les enfants s'occupent, regardent un film ou écoutent de la musique. Peu à peu ces regards inquiets se transforment,  ils en deviennt presque charmants.

Voilà 24 heures que nous avons quitté le sol de la Belgique, nous sommes enfin arrivés, quelle joie!

Quelle joie de trouver un endroit où la différence ne fait pas peur. J'ai l'impression d'être une star. Quelques heures de décalage et nous voilà propulsés dans un monde où on nous sourit, où on nous tend les bras, où on nous félicite sans cesse sur la beauté de cette différence, sur l'émotion dégagée par Simon et ses soeurs.

Par moments, j'aimerais rester seule, lire plus d'une page de mon livre sans être interrompue par : "Oh, He is so beautifull" ; "Congratulations! Your family is so cute!" Tout cela est nouveau pour moi, je n'y suis pas habituée. Je me resaissis et m'empreigne de toute cette énergie positive, je fais le plein pour les années à venir.

Amélie y est pour beaucoup. Je l'observe, je souris. J'ai une mini moi en face de moi. Pas question de laisser son frère à la traine. Elle s'occupe de lui et l'entraine dans ses jeux de manière toute naturelle. Ce n'est pas son rôle et pourtant, elle le fait avec tellement de plaisir que je ne peux pas la freiner dans cet élan.

Même si cette effusion d'amour me touche en plein coeur, j'aimerais que Simon vole vraiment de ses propres ailes et tant qu'Amélie respirera à sa place, on ne pourra pas avancer...Je laisse faire. Je préfère qu'ils partagent de vrais moments de complicité qui resteront gravés dans leur mémoire plutôt que de me remettre à le stimuler. Ce sont les vacances pour moi aussi.

Dans l'hotel, d'autres personnes handicapées sont là. Spontanément et sans effort particulier, ils participent aux différentes animations. L'intégration des vacanciers se passe à merveille et tout le monde trouve cela normal. J'ai les yeux qui brillent et c'est mon étonnement qui surprend.

A table, j'aperçois un jeune handicapé qui se dandinne, sa tête bascule de manière répétitive. Mon regard se pose sur lui un instant, pourvu que sa tête ne tombe pas dans l'assiette. Je souris de manière complice et sa mère me rend mon sourire. Même si notre quotidien n'est pas identique, nous traversons les mêmes épreuves, nous le savons, pas besoin de longs discours. Egoïstement, je me dis que j'ai beaucoup de chance d'avoir un jeune qui n'est que trisomique finalement.
Simon n'est toujours pas à l'aise dans les restaurants et lorsqu'il passe à côté de son acolyte, il lui sourit, ils se comprennent.

Lors des excursions, Simon est de plus en plus présent et demande à participer de manière autonome aux différentes activités. Au programme nage avec les dauphins, descente en tyrolienne,... Seules les chauves-souris ont réussi à lui faire renoncer à une descente dans une grotte.

Je nous revois dans le bateau nous menant au large pour observer la beauté du monde marin. L'animateur propose à chaque touriste de boire une gorgée de tequila à la santé de Mexico, ce que nous acceptons avec grand plaisir. Photo et piège à touriste obligent...Les enfants quant à eux, ont le droit de prendre la bouteille en main, de la brandir haut et fort en criant "Viva Mexico!"

Il s'en est fallu de peu pour que Simon n'honore le Mexique. Il porte la bouteille à sa bouche et s'arrête juste à temps lorsque d'une seule et même voix, les touristent crient "Nooooooon!"

Simon se met alors à rire aux éclats et me dit "C'est une blague maman!"

Merci le Mexique pour cet accueil si chaleureux, merci pour ces belles vacances!

mardi 22 juillet 2014

Trisomie ou fainéantise ?

Fini le temps où Simon courait dans tous les sens, où il s'échappait vers d'autres lieux plus intéressants, plus beaux, plus éloignés de là où on l'attend.

Est enfin arrivé le temps du repos. Et quel repos!

Dans nos vies actives, les mots qui reviennent sans cesse sont : "vite, dépêche-toi et viiiiiiiiite!"

Du jour au lendemain, sans prévenir, Simon a banni de son vocabulaire le mot "vite".

Peut-être est-ce à cause de ses pieds plats...Il doit avoir mal aux pieds, il ne sait peut-être plus courir.
Peut-être est-ce à cause de son retard mental...Il ne comprend peut-être pas tous les mots de la phrase. Y-a-t'il trop de mots dans la consigne, ce qui provoquerait un cafouillage supplémentaire dans son cerveau.
Peut-être est-ce tout simplement un effet de sa trisomie qui l'empêche d'enchainer les mouvements et de se dépêcher.

Mon pauvre loulou, maman va t'aider!

Oui mais voyez-vous, il semblerait que mon fils ne puisse se dépêcher que dans certaines circonstances. Il serait du genre "sélectif".

Se dépêcher pour s'habiller et aller à l'école...Mission impossible! Il prend son temps pour se réveiller et mettre un vêtement après l'autre, lentement, très lentement, de manière à ce que vraiment trop en retard, nous puissions l'aider, allant jusqu'à lever la jambe pour lui.
Se dépêcher pour s'abiller et partir en vacances ou dans un parc d'attractions...Et le voilà parti comme une fusée. C'est le premier levé, habillé, coiffé...même les chaussures sont à l'endroit. Allez savoir pourquoi...

Courir lors d'activités parascolaires en intégration...Trop fatiguant! Au bout de 5 minutes, Simon s'assoit à terre et regarde l'activité se dérouler en toute tranquilité.
Courir de manière spontanée pour attrapper un ballon de football et se mêler aux autres joueurs pris de sympathie pour lui, ça il sait faire.

Nous accompagner en promenade..."Moi reste ici, suis occupé" me dit-il. Pas envie de marcher et de lâcher la console de jeux.
Nous accompagner pour aller faire des courses au supermarché...Pas le temps de prendre les clés qu'il est déjà dans la voiture, sa liste à la main (frites, ketchup, bonbons et apéro).

Trop longtemps, j'ai mis certains aspects de son comportement sur le dos de la trisomie, oubliant que mon Simon est un adolescent avant d'être un trisomique. Il sait pertinemment bien ce dont il a envie et ce dont il n'a pas envie.

Tout n'est pas question de trisomie, je le sais et pourtant, je tombe encore dans le piège, lui accordant bien des privilèges qui ne lui seraient pas permis s'il avait la simple étiquette d'adolescent super fainéant!

Son regard coquin et son sourire malicieux me font prendre conscience que par moments, il se paye bien ma tête et celle de son entourrage!

samedi 19 juillet 2014

Télévision en famille

Comme toujours, Simon passe des heures et des heures dans sa chambre. Il nous faut ruser pour l'en faire sortir. 

Je dois souvent argumenter et le convaincre que la vie en dehors de sa chambre est bien plus intéressante.

Lorsque je l'aperçois enfin descendre et qu'il est déjà l'heure du coucher, je ne sais plus si je dois sourire, me résigner ou m'énerver.

Tranquille, il se sert d'un dessert lacté, il s'installe dans le fauteuil et nous dit : "On va regarder un film en famille?"

Pas vraiment, il serait plutôt l'heure d'aller se coucher...

Ce sont les vacances, quelques heures volées avec nous ne vont pas te tuer et puis, je ne résiste pas au charme fou de son sourire.

Ce soir au programme, Fort Boyard! Il n'est pas convaincu mais le choix de la majorité l'a emporté.

Les participants courent, rigolent, passent des épreuves au milieu des serpents et des scorpions. Il regarde d'un air dégoûté mais il reste parmi nous.

Et puis, l'espace d'une demi seconde, une souris passe. Son visage se crispe. Il les a en horreur. Même ratatouille n'a pas réussi à le réconcilier avec ces petites bêtes à poils. Le simple fait de les voir le rend hystérique, il perd le contrôle de lui-même, impossible de le raisonner. Qu'elles soient blanches, brunes ou grises, peu importe, toujours cette peur harassante.

Les peluches, les dessins, les livres, ... pas de souris, on l'a bien compris.

Si une simple représentation provoque un tel émoi en lui, je vous laisse imaginer sa réaction lorsque la créature est si proche de lui dans le petit écran.

D'un geste brusque, il se lève et s'enfuit vers la pièce voisine, faisant tomber tout ce qui se trouve sur son passage. S'enfuir, voilà son mot d'ordre.

Simon : "Voilà, c'est fini télévision en famille"
Moi : "Allez Simon, revient! C'est fini les souris"

Il revient parmi nous quelques minutes plus tard mais cette fois-ci, il est équipé. Il a emporté l'ordinateur portable dans le salon, prêt à se réfugier sur le net au prochain passage de souricette...



vendredi 18 juillet 2014

Le temps de la puberté

On ne l'a pas vue arriver et pourtant, elle est bien là...la puberté!

Au début, j'aperçois sur son bas ventre un poil, puis deux. Quelques mois plus tard, un homme! 12 ans et voilà que tu as le physique d'un jeune homme. Mais que le temps passe vite, trop vite. Fini le temps où tu te promenais tout nu dans le jardin et que tout le monde trouvait cela mignon.

Le temps est à la puberté et cela, ça s'apprend aussi.

Dans la salle de bains, désormais on ferme la porte. Interdiction que les filles viennent te déranger pendant que tu te laves. Oui, oui, tu m'as bien entendue : "pendant que TU te laves". J'ai entendu dire que la plupart des garçons trisomiques avaient un micro pénis. Ou ce ne sont que des balivernes ou tu es exceptionnel. En mère hyper fière que je suis, j'opterai pour la deuxième option.

C'est ton corps, ton intimité. Quelque chose a changé et ce n'est pas que physique. Tu n'es plus un enfant, je dois l'accepter, je n'ai plus ma place auprès de toi dans cette salle de bains.

Cela ne m'empêche pas de regarder par le trou de la serrure et inspecter le trajet du gant de toilette. Se laver j'ai dit, pas jouer! Lorsque tu te prélasses trop longtemps, j'ouvre la porte d'un geste sec et je te dis : "Ahah, je t'ai vu! Allez hop, laves-toi!". Et toi, tu ris aux larmes!

Les jours passent et à nouveau j'aperçois, un poil, puis deux...Mais tu commences à avoir de la moustache! Le bas ventre est caché mais pas la moustache. J'ai beau scruter ton visage, c'est encore celui d'un enfant que je vois, pas celui d'un adolescent. J'en suis omnibulée, je ne vois plus que ça. Dois-je t'apprendre à te raser? Lame ou rasoir électrique.
- " Mais cela ne voit pas ou à peine!"
- " Vraiment? Car je ne vois que ça"
- " Ne commence pas à le raser maintenant, ce sera pire après!
- " Tu crois? Je ne veux pas que mon fils soit moche"
- " Il n'est pas moche, il grandit et c'est un ado désormais. Et attend de voir les boutons d'acnée..."
- " T'es censée me rassurer là ? Car là, pour le coup, c'est râté!"

Et après les poils, le comportement!
Il passe de plus en plus de temps seul dans sa chambre. Il a bien compris que c'est son territoire. Personne n'a le droit d'y pénétrer sans son autorisation. Il joue, il lit, il dessine. Sa porte est toujours fermée. Il ne la quitte que pour manger ou pour jouer avec ses soeurs dans le jardin. Il y range ses affaires à sa manière...à la manière d'un vrai adolescent en somme!

- " Simon, tu viens avec moi accompagner ta soeur à la piscine"
- " Non maman, reste ici"
- " Tout seul?"
- " Oui, tout seul, jouer dans ma chambre!"
- " D'accord mais tu me fais une phrase correcte. Répète après moi : je vais jouer dans ma chambre"
- " Je vais jouer dans ma chambre"
- " Tu n'ouvres à personne et tu ne fais pas de bêtise, compris ?"
- " Oui, oui" et il referme sa porte aussitôt!

Inutile de vous dire que je frôle l'excès de vitesse pour rentrer le plus rapidement possible. Et lorsque hors d'haleine, je suis enfin de retour, je le retrouve dans sa chambre entrain de jouer à la console de jeux. Il s'est servi de jus et de bonbons. Il est tranquille, calme, serein.

Moi qui pensais que la trisomie m'épargenerait la puberté...que du contraire, elle est même arrivée avec un peu d'avance!