lundi 29 mars 2010

Adaptation du temps de travail

Lorsque Simon arrive dans ma vie, je travaille pour une compagnie aérienne italienne. L'ambiance y est bon enfant. Je n'ai pas l'impression d'aller travailler mais bien de partir en colonies de vacances chaque matin. Je n'ai pas de collègues mais bien des amis.

Seul problème, une hiérarchie qui se trouve à l'étranger, avec laquelle il est n'est pas facile de négocier.

Pas le temps d'accompagner Simon à l'école, ni même d'aller le rechercher, sans parler des différentes séances de psychomotricité et de logopédie.

Pendant plus de 4 ans, mon père, alias nonno, prend tout en charge. Il l'accompagne à l'école, va le rechercher, le fait goûter, l'accompagne partout, il joue avec lui et le fait progresser. C'est notamment grâce à lui que Simon a marché à l'âge de 18 mois et a été propre très rapidement.

Alors que je bataille pour maintenir mon équilibre psychique, je délègue tout ce qui touche à son évolution.

C'est une solution qui me semblait idéale. Oui mais le temps passe, il passe trop vite.

Un jour, alors que je m'étais arrangée pour aller rechercher Simon à l'école, une autre maman me dit : "Oh, il est adorable votre petit frère!" Non, ce n'est pas mon frère, c'est mon fils!

Je sens que nonno fatigue, il enchaîne les petits accidents de voiture, il n'a plus la même énergie qu'auparavant et cet incident me fait prendre conscience que je dois reprendre ma place et trouver un emploi qui me permette de concilier famille et travail.

Adieu la colonie de vacances, les fêtes et les apéros volés derrière nos écrans. Il faut que je grandisse, que je mûrisse.

Lors d'un dîner entre amis, on me parle d'une personne qui cherche une secrétaire à temps partiel. Je feins de m'y intéresser pour ne pas paraître prétencieuse mais au fond de moi, cela ne m'intéresse pas.
On me demande un curriculum vitae, je l'envois sans lettre d'accompagnement. Je n'ose pas décliner la proposition et j'espère qu'en baclant la procédure, je ne puisse convenir à l'emploi.
Je suis surprise lorsqu'on me téléphone pour me demander un entretien. Une fois de plus, je m'y rends sans aucune conviction. Je n'ai aucune intention de rejoindre des juristes, c'est un monde que j'ai décidé de quitter dès l'université et pas question d'y retourner.

Lorsque j'arrive à cet entretien, l'ambiance est glaciale. Ils sont classiques, formels, ils ne sourient pas. Je respire profondément et me dis que le supplice ne durera pas très longtemps. Je veux bien changer de travail mais pas ça, oh non! Le sacrifice est trop important!

L'entretien commence, l'homme en face de moi s'appelle Simon. Rien que pour ça, je me dis que je peux bien lui consacrer cinq minutes.
Il me dit d'emblée qu'il sait pour mon Simon, il sait que j'ai besoin d'horaires flexibles. Il prend une feuille de brouillon dans la corbeille à papiers, il ne me regarde pas, il fixe sa feuille et me demande quels sont les horaires que je souhaite. Je crois à une grosse plaisanterie voire à une caméra cachée et ne répond pas. Vu mon silence, il soulève le regard et je comprends alors que ce n'est pas une plaisanterie, il attend une réponse. Je lui fais part de mes souhaits avec chaque jour, un horaire différent. Il accepte sans même essayer de négocier, allant même jusqu'à me proposer un salaire décent alors que je ne connaissais rien à la fonction.

Lorsque je décide de franchir le pas, mes proches se moquent de moi, me disant que je ne tiendrais pas une semaine à ce poste. Les paris sont lancés.

Au début, je veux juste gagner mon pari. Cela fait 5 ans à présent que j'ai rejoint cette équipe. Je ne retrouverai jamais une ambiance comparable à celle des voyages mais j'ai trouvé bien plus. J'ai trouvé un patron, qui reste un patron, mais surtout un patron humain qui ne m'a jamais laissé tombée et qui m'a toujours aidée à aménager mes horaires en fonction des besoins de Simon.

Aujourd'hui, j'ai repris ma place dans la vie de Simon. Je vais le rechercher à l'école et je peux discuter avec ses institutrices, je peux suivre son évolution. Je l'accompagne à certaines de ses séances de logopédies. J'ai le temps de lui accorder du temps.

Nonno aussi a repris sa place. Il l'aime comme un grand-père peut aimer son petit-fis. Il aime jouer au football avec lui ou lui raconter une histoire. Il continue de temps en temps à jouer au taxi, mais ce n'est plus la règle, c'est devenu l'exception.

J'ai appris à apprécier mon travail et j'ai acquis une qualité de vie que jamais je n'aurais pu imaginer avoir. Une qualité de vie bien précieuse à mes yeux.

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